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Le réchauffement planétaire va-t-il
assécher nos rivières ?
Si le réchauffement planétaire est désormais avéré, ses conséquences
sur nos rivières restent à évaluer. Des hydrologues du Cemagref à
Lyon ont pu démontrer une tendance à l’accentuation des basses eaux
en France au cours des dernières décennies. Une étude d’impact
appliquée à différents scénarios de changement climatique indique
également une tendance à la baisse pour le XXIème siècle. Mais les
chiffres sont pour l’instant trop imprécis pour être traduits en
recommandations de gestion. Les chercheurs proposent une voie plus
rapidement opérationnelle : estimer la vulnérabilité des bassins
versants à la sécheresse.
En France, les huit premiers mois de l’année 2003 ont atteint leur
record de déficit pluviométrique depuis 1946. En 2005, 71 des 96
départements français de métropole ont fait l’objet de mesures de
restriction d’usage de la ressource en eau. De telles situations
menacent ses différents usages : production hydroélectrique,
refroidissement des centrales nucléaires et thermiques, transport
fluvial, agriculture, tourisme et loisirs, ainsi que l’équilibre des
écosystèmes aquatiques : disparition de certaines espèces,
envahissement par d’autres… Les scientifiques s’accordent sur la
réalité du réchauffement climatique en cours. L’élévation de la
température annuelle de 1°C en France semble désormais avérée.
Quelles seront les conséquences sur les niveaux de nos cours d’eau ?
Une changement est-il d’ores et déjà mesurable ? Les étiages, ou
basses eaux, ont-ils tendance à s’accentuer ? Une équipe du Cemagref
à Lyon mène depuis 1999 diverses actions de recherche sur les
relations entre climat et hydrologie, avec le soutien d’EDF, de la
Compagnie nationale du Rhône, des Diren (Directions régionales de
l’environnement) et des partenaires scientifiques.
Rechercher les signes du changement en cours
Une des actions a consisté à rechercher des preuves statistiques
d’une éventuelle modification des débits d’étiage en France
métropolitaine sur les dernières décennies. Les nouveaux outils
statistiques développés au Cemagref ont permis de détecter une
tendance à l’aggravation des étiages estivaux dans les secteurs
pyrénéen et basque. À l’inverse, dans la zone alpine, l’augmentation
des températures de l’air semble avoir réduit la quantité d’eau
retenue en hiver sous forme de neige, augmentant ainsi les débits de
basses eaux sur cette saison. Pour les autres bassins examinés, le
régime des étiages semble stable. Des examens complémentaires sont
toutefois nécessaires pour confirmer l’origine purement climatique
de ces résultats, les actions humaines étant souvent impliquées dans
l’aggravation des faibles débits.
Étude d’impact
Une deuxième action, une étude d’impact, a consisté à estimer les
conséquences potentielles d’évolutions climatiques sur les débits
des rivières au XXIe siècle, en s’appuyant sur des scénarios de
changement climatique mis à disposition par la communauté
scientifique internationale. Les chercheurs se sont d’abord appuyés
sur les mesures de débit actuellement disponibles pour « caler » les
modèles hydrologiques lorsque c’était nécessaire. Ces modèles
calculent des valeurs de débit d’un cours d’eau en fonction des
précipitations sur son bassin versant. Ils ont ensuite examiné la
réponse de ces modèles aux perturbations prévues par les scénarios,
qui diffèrent sur l’évolution de la démographie, la croissance
économique et les solutions technologiques envisagées.
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Prévisions convergentes
Les recherches ont porté sur le bassin du Rhône et ses affluents
français. Sur les bassins dont l’écoulement est généré par les
pluies (régime pluvial), les estimations s’accordent toutes sur une
diminution du niveau des basses eaux en été. Les bassins dont le
régime actuel est dominé par la fonte des neiges (régime nival)
verraient leurs écoulements hivernaux augmenter sensiblement, tandis
que leurs débits estivaux diminueraient par l’assèchement plus
marqué des sols et la disparition des stocks neigeux. Pour la Drôme,
l’Azergues, le Roubion et l’Eyrieux, un des scénarios les plus «
chauds » prévoit que le débit mensuel minimal atteint sur l‘année
serait en moyenne inférieur à 25 % de sa valeur actuelle.
Évaluer la vulnérabilité
Toutefois, si ces tendances générales sont reproduites par tous les
scénarios, les estimations diffèrent fortement d’un scénario à
l’autre, mais aussi d’un bassin à l’autre selon la géologie et le
relief. Dans l’état actuel des connaissances, il n’est pas possible
de faire des prévisions précises et aucun résultat n’est
généralisable à l’ensemble des rivières françaises. Il est en
revanche possible d’évaluer la vulnérabilité intrinsèque des
différents cours d’eau, quelle que soit l’évolution du climat. Les
chercheurs ont récemment défini un « coefficient d’élasticité » qui
représente la capacité de résistance aux variations du climat. Une
information directement opérationnelle pour identifier les
territoires les plus sensibles aux changements climatiques.
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